Ce samedi nous sommes retournés au National Mall pour visiter la partie Ouest du parc où se trouvent la majorité des mémoriaux. Ces mémoriaux nous font voyager à travers l’histoire des États-Unis: la signature de la constitution et la naissance de la démocratie américaine, la guerre de Sécession et la lutte contre l’esclavage, la grande dépression et le New Deal, la seconde guerre mondiale, la guerre du Vietnam et la bataille pour l’égalité des droits civiques. J’ai donc décidé d’écrire une série d’articles pour expliquer le contexte historique de ces mémoriaux et des événements et protagonistes auxquels ils sont dédiés.
L’année dernière nous nous étions promenés dans la partie Est du National Mall, jusqu’au Capitole. J’avais raconté notre excursion dans un article qui informe également sur la construction de la ville et le statut du District de Columbia. Cette année nous avons focalisé notre circuit vers les mémoriaux. Nous ne les avons pas tous vus, mais nous en avons vu suffisamment pour retracer les grandes lignes de l’histoire des États-Unis. Je vous propose deux façons d’explorer ces mémoriaux, dans l’espace (carte interactive ci-dessous) et dans le temps (liens vers les articles dans l’ordre chronologique).
En ce moment, c’est le printemps! Les bourgeons des arbres ont grossi mais les feuilles ne sont pas encore sorties. Par contre les fleurs sont déjà ouvertes et colorent la nature après les tons plus ternes de l’hiver. La nature s’éveille au chant des oiseaux et au bourdonnement des insectes.
Après notre promenade au Jug Bay Wetlands Sanctuary, nous nous sommes arrêtés à Washington sur le National Mall, où nous avions passé un après-midi l’année dernière pour voir la Maison Blanche et le Capitole. Cette fois-ci nous voulons voir les cerisiers autour du Tidal Basin. Contrairement à notre première excursion, lors de laquelle nous étions quasiment tout seuls au milieu du National Mall sous un soleil de plomb, cette fois-ci nous avons bataillé dans les embouteillages et pour trouver une place où se garer.
Après un créneau serré, nous nous dirigeons directement vers le Tidal Basin, assailli par les visiteurs pour le Cherry Blossom Festival, qui a lieu de mi-mars à mi-avril.
Brève histoire des cerisiers du National Mall
En 1885 la journaliste Eliza Scidmore propose de planter des cerisiers au bord du fleuve Potomac à la suite d’un voyage a Japon. En 1906 David Fairchild plante plusieurs cerisiers dans sa propriété située dans le Maryland pour tester si les cerisiers sont adaptés au climat local. Suite au succès de cette expérience, la famille Fairchild encourage la plantation de cerisiers dans la région. Ceci encourage également Eliza Scidmore à réitérer son idée de planter des cerisiers sur le National Mall auprès des autorités en 1909. La première dame Helen Taft reçoit l’idée favorablement et soutient Eliza Scidmore. Jokichi Takamine, un chimiste japonais de passage à Washington DC, a vent du projet. Il propose une donation de 2,000 cerisiers et obtient le soutient du maire du Tokyo.
En décembre 1909 les arbres arrivent à Seattle et début janvier à Washinton DC. Malheureusement ils sont infestés d’insectes et malades, et doivent être brûlés. Le maire de Tokyo Yukio Ozaki propose alors une seconde donation de 3,020 cerisiers qui arrivent fin mars 1912 à Washington DC. La première dame Helen Taft et la femme de l’ambassadeur du Japon Viscountess Chinda plantèrent les deux premiers cerisiers sur les berges du Tidal Basin.
Cela initia des relations amicales assorties de cadeaux réciproques entre les deux nations. En 1965, le gouvernement japonais fit une autre donation de 3,800 cerisiers Yoshino, qui sont maintentant plantés autour du Washington Monument. Les Washingtoniens tiennent particulièrement à la préservation des cerisiers. En 1938, les plans du Jefferson Memorial prévoyaient d’empiéter sur la zone des cerisiers. Dans un dernier effort pour tenter d’empêcher l’abattage programmé des cerisiers après de nombreuses manifestations, Eleanor “Cissy” Patterson, propriétaire du journal Washington Times-Herald, mena la rébellion des cerisiers pendant laquelle un groupe de femmes s’enchaîna aux cerisiers en signe de protestation.
Aujourd’hui le parc habrite environ 3,800 cerisiers de 12 variétés différentes autour du Tidal Basin, du Washington Monument, et le long du fleuve Potomac. Selon la variété la couleur des fleurs varie de rose à blanche. Les variétés Yoshino et Kwanzan sont maintenant les plus communes dans la capitale. Les cerisiers plantés au bord du Tidal Basin sont majoritairement de la variété Yoshino, leurs fleurs blanches donne cet effet de nuage autour du bassin. La variété Kwanzan donne des fleurs roses qui éclosent environ 15 jours après les fleurs des cerisiers Yoshino. Les orticulteurs continuent de prélever des boutures et de planter de nouveaux cerisiers pour assurer la continuité des espèces présentes sur le National Mall.
Vers le Washington Monument
Washington Monument vu depuis la 17th Street
Vers le Tidal Basin
Cormoran pêchant devant les cerisiers en fleurs du Tidal Basin
À Germantown
Les cerisiers du National Mall sont les plus connus, mais on peut aussi voir des cerisiers dans toute la région autours de Washington DC, jusqu’au pied de mon immeuble!
Après avoir passé quelques week-ends à déballer les affaires et organiser l’appartement, nous avons décidé d’aller visiter Washington DC le dimanche après-midi par 35oC à l’ombre. Pour rejoindre la capitale, nous empruntons la George Washington Memorial Pikeway en Virginie, le long de la Potomac River. Étant donné la situation sanitaire, il y a très peu d’affluence et nous trouvons une place de parking à 5 minutes à pied de la Maison Blanche sur la Constitution Avenue, en face des Jardins de la Constitution.
Un peu d’histoire
La ville a été fondée en 1790. La localisation de la capitale est un compromis entre deux lignes politiques, qui veulent chacune avoir la capitale sur son territoire. Les états du Nord défendent la formation d’un gouvernement fédéral qui gère la dette de la guerre d’indépendance (1775-1783) et les états du Sud veulent un gouvernement favorable aux propriétaires d’esclaves. Après l’accord du Maryland et de la Virginie de céder un partie de leurs territoires respectifs, le président George Washington crée le District de Columbia (DC) qui abritera la capitale du pays.
L’architecte Pierre Charles L’Enfant est chargé de dessiner les plans de la nouvelle capitale. Il crée un réseau de boulevards se croisant à angle droit et qui aujourd’hui portent le nom des états. La capitale reste longtemps de taille modeste et est presque entièrement détruite en 1812 lors de la guerre contre la Grande-Bretagne. En 1847, la superficie du District de Columbia diminue, la portion de territoire léguée par la Virginie étant restituée à son état d’origine. La ville voit un accroissement de sa population à partir de 1862, année à partir de laquelle les esclaves en fuite sont émancipés dans le district. Depuis, Washington a gardé une large communauté africaine-américaine. Suite à cet accroissement de population, en 1901, le McMillan Plan décide de terminer les constructions prévues initialement par les plans de L’Enfant, qui étend également la superficie du National Mall.
« Taxation without representation »
Bien qu’habitant la capitale du pays, les résidents de Washington DC ne sont pas représentés de la même façon au congrès que les habitants des autres états. Leur représentation est réduite à une déléguée à la chambre des représentants, qui n’est pas autorisée à participer aux votes, et à un sénateur. Les habitants n’ont été autorisés à participer aux élections fédérales qu’à partir de 1964. La représentante du district se bat depuis plusieurs années pour que le district soit transformé en état, afin que les habitants de la capitale aient les mêmes droits que les citoyens du reste du pays. Pour l’instant les plaques d’immatriculation portent la mention « Taxation without representation ».
Le National Mall
Le National Mall est monumental pour un parc de centre ville, puisqu’il faut parcourir 4 km pour rejoindre ses extrémités Est et Ouest, ce qui nous avions largement sous-estimé. Nous avions donc prévu de faire le tour du parc pendant l’après-midi, ce que nous avons dû revoir à la baisse. Nous nous sommes finalement focalisés sur la Maison Blanche (de loin, à cause des distances de sécurité) et sur le Capitole, qui abrite la chambre des représentants et le sénat. Évidemment tout est fermé en ce moment, donc nous avons admiré les bâtiments de l’extérieur. C’est assez impressionnant d’être si proche des institutions clefs de la politique américaine, qui déterminent non seulement les lois d’un des pays les plus puissants du monde, mais aussi la politique extérieure qui a des conséquences importantes sur la vie des habitants de nombreux autres pays.
Carte du National Mall, parc qui relie la Maison Blanche (au Nord) au Capitole (à l’Est), qui s’étend jusqu’à la Potomac River (à l’Ouest), et où se trouvent de nombreux monuments et mémoriaux, tels que l’obélisque du Washington Monument.
Le Mall abrite également de nombreux musées d’art, de science, et sur l’histoire américaine. Malheureusement tout est fermé en ce moment, il va falloir patienter. Pour l’instant, voici un aperçu en images du National Mall en temps de pandémie et de canicule.
La Maison Blanche vue de la Constitution AvenuePershing Park
Washington MonumentU.S. Department of CommerceNational Museum of African American History and Culture entouré de chênes (Quercus virginiana). Cette espèce de chênes a la particularité de ne pas perdre ses feuilles en automne. Ils sont natifs du Sud-Est des États-Unis: leur habitat naturel s’étend de la Virginie à la Floride, et vers l’Ouest jusqu’au Texas. Cet arbre est un symbole de sécurité, de force et de résilience, qui apportait de l’ombre et un abri aux esclaves lorsqu’ils travaillaient dans les champs ou qu’ils se rassemblaient pour les services religieux. Ces chênes étaient aussi une source de bois pour la construction de bateaux par les afro-américains. Au cours de la guerre de Sécession (1861-1865), Mary Smith Peak enseigna à des anciens esclaves récemment libérés à l’ombre du Chêne de l’Émancipation, malgré les lois interdisant de faire classe aux afro-américains en Virginie. Ces cours seraient l’origine de l’Université d’Hampton en Virginie.
Les dessins de la structure métallique du musée représentent les branchages des chênes.
Cyrus dans le jardin de chênes.
Chêne (Quercus virginiana)
Pause eau!
Vue sur le National Mall, avec le Capitole au centre et le Smithsonian Castle à droiteU.S. Department of AgricultureLe Capitole est encore loin!Smithsonian National Museum of Natural HistorySmithsonian Castle
National Museum of the American Indian
Le Capitole et la statue de Ulysses Grant (18e président, de 1869 à 1877)U.S. Botanic Garden au second plan
Cousins de pigeons parisiens: les pigeons washingtoniens
Retour à la voiture: le Smithsonian Castle éclairé par un soleil rasant.
Retour à la voiture: la maison blanche en début de soirée.
Statue de José Artigas
Statue de Simón Bolívar
Statues proches de la Maison BlancheUn bateau en acier
Assoiffés et affamés, nous voilà de retour à la voiture. Sur la route, on s’arrête un moment pour casser la croûte et admirer le coucher du soleil sur la Potomac River.