March 24 – Death Valley (3) – Furnace Creek

Golden Canyon loop

Ce matin nous commençons par une randonnée dans les badlands que nous avons surplombés la veille depuis Zabriskie Point. La montée se fait à l’ombre dans les canyons qui serpentent à travers les falaises de grès et d’argile. Nous empruntons d’abord le Golden Canyon pour atteindre Red Cathedral, dont le chemin se termine par une montée très abrupte au pied de la falaise. Ensuite, nous rebroussons chemin sur quelques centaines de mètres pour suivre un chemin qui traverse les badlands et rejoint Gower Gulch, un canyon plus large qui nous ramène vers notre point de départ.

Golden Canyon
Golden Canyon
Golden Canyon

Les badlands dans lesquels nous marchons sont constitués de grès et d’argile qui se sont formés il y a 3 à 5 millions d’années. À cette époque-là, la vallée de la Mort n’était pas encore aussi basse par rapport aux montagnes qui l’entourent et les dépressions étaient remplies de lacs. Les couches de sédiments constituées de sable, d’argile et de cendres volcaniques se sont déposées horizontalement au fond des lacs, se sont solidifiées pour former des roches sédimentaires, puis on été inclinées par l’activité tectonique de la région. L’évaporation des lacs et le jeu des failles à l’origine de la vallée ont exposé ces roches sédimentaires à la surface, et les ont soumises à l’altération. Les nombreux canyons et ravines montrent que ces badlands ont été façonnés par l’action de l’eau lors de crues subites appelées flash floods.

Badlands et Telescope Peak à l’horizon
Montée à l’ombre du Manly Beacon

Les roches sombres sont des coulées de lave qui se sont déposées au fond du lac. En se refroidissant, la lave a réchauffé l’eau du lac. Ce changement de température a favorisé la précipitation de minéraux tels que le borax, le gypse, et la calcite, dont une partie a été exploitée par les companies minières au début du XXe siècle.

Falaises de Red Cathedral
Gower Gulch
Gower Gulch
Sortie de Gower Gulch – une tranchée a été creusée par une rivière éphémère
Canyon donnant sur Gower Gulch
Retour vers notre point de départ
Coulées volcaniques en haut de la falaise
Vallée de la Mort et Telescope Peak

Harmony Borax Works

La ruée vers l’or et autres métaux n’a pas produit beaucoup de fortunes dans la région, c’est le borax, « l’or blanc du désert », qui était le plus rentable. À cette époque, le borax était utilisé entre autre par les forgerons, les pottiers, dans les fermes laitières, l’industries de la viande, et pour certains travaux ménagers. Harmony Borax Works était l’une des premières usines de Borax dans la Vallée de la Mort. Cet atelier a été opérationnel de 1883 à 1888. Les problèmes financiers du propriétaire William Coleman et la découverte de borax à d’autres sites en Californie a précipité la fermeture de l’atelier après 5 ans de production.

Les ouvriers chinois recrutés à San Francisco étaient chargés de récolter la croûte de sel contenant le borax et de l’amener à l’atelier de raffinage sur des chariots. Ces ouvriers étaient payé $1.30 par jour sans compter le logement et la nourriture qu’ils devaient acheter au magasin de l’usine. Des abris de fortune et des tentes étaient installés dans la plaine à côté de l’atelier. Les ouvriers chinois y dormaient et mangeaient alors que les autres ouvriers étaient hébergés a Furnace Creek Ranch.

Plaine de sel d’où était extrait le borax et où vivaient les ouvriers chinois.

Le borax est rafiné, afin de le séparer de la boue et des autres sels avec lesquels il est mélangé. Le raffinage devait être fait sur place afin de transporter moins de minerai et diminuer le coût du transport. Le minerais est d’abord versé dans une cuve d’eau bouillante à laquelle on ajoute de la soude. Le borax est dissous tandis que la boue et la chaux sédimentent au fond de la cuve. Le borax dissout est transféré dans des cuves de refroidissement dans laquelle il recristallise sur des tiges métalliques. Des toiles épaisses imbibées d’eau sont placées autour des cuves pour les refroidir par évaporation de l’eau. Le borax ne critallisant pas à des températures supérieur à 49oC, l’atelier ne fonctionnait pas pendant l’été. Le borax rafiné est ensuite détaché des supports métalliques. Ce processus est répété plusieurs fois pour produire du borax plus concentré. Le borax était ensuite mis en sacs pour le transport.

Ensemble de l’atelier de purification du borax – de gauche à droite: la chaudière (partiellement cachée par la construction en pierre), les cuves de dissolution du borax, et les cuves de sédimentation des impuretés.
Chaudière
Chaudière et cuves de dissolution du borax

Pendant plus d’un siècle, les atelages de vingt mules ont été le symbole de l’industrie du borax. La Vallée de la Mort étant particulièrement inospitalière et loin des lieux de vente et d’utilisation du borax, seules les mules étaient assez résistantes pour transporter ce minerais. Chaque atelage tirait une charge de plus de 33 tonnes (dont 4500 litres d’eau potable), et devait traverser plus de 250 km de montagnes et de plaines désertiques pour atteindre la gare la plus proche.

Convoi tiré par les atelages de vingt mules, la réserve d’eau (à gauche) étant l’arrière du convoi.
Plaine de sel d’où était extrait le borax.

Salt Creek

Nous quittons la route principale pour emprunter une route en terre et rejoindre notre destination: Salt Creek. La route serpente, et au détour d’un virage Cyrus me dit: « Tu vois ces espèces de touffes d’herbes? Quand on voit ça en Iran, ça veut dire qu’il y a de l’eau pas loin ». Et au virage suivant, on se retrouve face à une rivière! On aurait pû s’en douter, la traduction de « Salt Creek » étant « ruisseau salé », voici l’oasis au milieu du désert.

La source de cette rivière est à près de deux kilomètres en amont de cette balade. L’eau de la source est saumâtre et devient de plus en plus salée à cause de l’évaporation intense. Selon les saisons cette eau peut être plus salée que l’eau de mer. Bien que l’eau soit trop salée pour être une source d’eau potable pour les humains, cette rivière est source de vie pour de nombreuses espèces animales et végétales. Les oiseaux migrateurs y font halte, on y trouve également de nombreux insectes, des lapins, des souris, des lésards et autres reptiles, et même des renards et des coyotes.

Cette rivière abrite également une espèce de poisson, le pupfish, qui a une espérence de vie d’environ un an et s’est adapté à l’environnement changeant. Il y a 10,000 ans, les ancêtres des pupfishs vivaient dans un grand lac d’eau douce qui remplissait la vallée. Sous le climat de plus en plus aride, les lacs se sont évaporés et les pupfishs se sont retrouvés prisonniers dans des mares dispersées à travers le désert. Le pupfish s’est diversifié en plusieures sous-espèces adaptées à des habitats spécifiques et ayant des formes, des dessins, et des stratégies de survie différentes. Ces espèces sont capables de survivre dans de l’eau douce à salée (ayant une salinité plusieurs fois supérieur à celle de l’eau de mer) et dans des conditions de température très variables d’environ 0 à 37oC.

Les plantes ont aussi développé des stratégies d’adaptation au sel. Par exemple, la salicorne stocke le sel dans des cellules particulières et remplace régulièrement les parties de tiges qui contiennent trop de sel. Les Saltgrass sécrètent le sel sur leurs feuilles où les cristaux de sel aident à refléter la lumière du soleil.

Les roches sédimentaires de la Vallée de la Mort révèlent qu’avant l’âge glaciaire, la région était habitée par des chameaux, des chevaux primitifs et des félins qui ont laissé leurs empreintes dans la roche.

C’est reparti!

Cet article fait partie d’une série d’articles consacrés à mon voyage dans l’Ouest des États-Unis en mars-avril 2022. Vous pouvez accéder à la liste des articles de cette série, à l’article précédent (March 23 – Death Valley (2) – Sud), et à l’article suivant (March 24 – Death Valley (4) – Nord).

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